Il n’y avait pas eu d’avancée majeure sur le front des antidépresseurs depuis près de 30 ans, depuis la mise sur le marché de la fluoxétine (Prozac).
Les américains auront bientôt accès à l’eskétamine, un nouveau médicament qui représente « une évolution majeure dans le traitement de la dépression », selon le docteur Pierre de Maricourt, chef de service de l’hôpital Sainte-Anne à Paris, qui a participé à deux des essais cliniques de phase 3 financés par Janssen.
L’agence américaine du médicament (FDA) a donné son feu vert mardi à la vente de cette molécule, commercialisée sous forme de spray nasal qui doit soulager des patients adultes dont la dépression résiste aux molécules actuellement disponibles. Selon le laboratoire Janssen, la molécule a également démontré qu’elle permettait de combattre les pensées suicidaires. Le nouveau médicament sera vendu sous le nom de Spravato aux Etats-Unis, produit par le laboratoire Janssen qui regroupe les activités pharmaceutiques de Johnson & Johnson, et ne pourra être pris que sous surveillance médicale en raison de possibles effets secondaires.
La dépression est l’une des maladies psychiques les plus répandues. Ce n’est pas une tristesse passagère, mais une maladie qui limite grandement la capacité à mener une vie quotidienne normale. Les cas les plus graves peuvent mener au suicide.
« Chaque année, près de 800.000 personnes meurent en se suicidant. Le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les 15-29 ans », note l’OMS sur la page consacrée à la maladie, soulignant également que moins de la moitié des personnes affectées dans le monde bénéficient des traitements existants. Or l’’eskétamine agit très vite – au bout de quelques jours seulement – comparée à la plupart des anti-dépresseurs commercialisés actuellement, qui peuvent mettre plusieurs semaines avant d’avoir un effet.
Une des craintes suscitées par l’utilisation de l’eskétamine réside dans les possibles effets secondaires. En effet, la kétamine, parfois surnommée « Special K » ou Kit Kat ou encore vitamine K est utilisée comme une drogue euphorisante qui intensifie les perceptions sensorielles, mais elle peut aussi parfois mener à un sentiment de dissociation, de sortie de son propre corps. Selon le laboratoire, cet effet, observé pendant les tests cliniques, se manifeste moins d’une heure après la prise du médicament et il se dissipe le jour-même.
Pour cette raison, « ce sera a priori un traitement à délivrance hospitalière en raison de la nécessité d’une surveillance du patient dans l’heure qui suit l’administration du médicament. On ne le prend pas tous les jours et pas à la maison », explique le docteur de Maricourt. Le médicament pourra être inhalé une ou deux fois par semaine, selon le laboratoire, qui juge aussi que le risque d’addiction, également évoqué, ne s’est pas concrétisé lors des essais cliniques.
Janssen a également déposé une demande de mise sur le marché auprès de l’Agence européenne des médicaments en octobre 2018.