Raphaël Gaillard, Président de la fondation Pierre Deniker, né en 1976 à Paris est psychiatre, Professeur d’université et expert judiciaire. Il était interviewé par Adèle Van Reeth dans le cadre de cours particulier sur les chemins de la philosophie sur France Culture. Cet interviewe était l’occasion de revenir sur son parcours ainsi que sur la parution de son essaie sorti en janvier 2022 aux éditions Grasset, Un coup de hache dans la tête où il explore les liens entre folie et créativité.
Morceaux choisis
« En même temps qu’il faut être et scientifique et littéraire, il faut beaucoup d’humilité pour être psychiatre. Il n’y a pas de modèle parfait qui remplit sa fonction auprès de tous les patients. L’exercice au quotidien de la psychiatrie, c’est être surpris chaque jour, c’est ne pas pouvoir répondre de la même façon à chaque patient. J’ai l’habitude de dire qu’en psychiatrie, ceux qui ont des certitudes, ce sont nos patients quand ils vont très mal. Et nous, psychiatres, nous n’avons pas de certitudes. Nous avons au contraire avec nous la force du doute et l’humilité de considérer qu’il n’y a pas une solution pour tous. Il n’y a pas la même résolution de l’énigme de l’enquête mais la nécessité de se laisser surprendre et d’inventer pour chaque patient.«
« Les neurosciences nous disent que notre cerveau est devenu un organe d’une puissance et d’une complexité incroyables. Et à ce niveau de complexité, il peut y avoir des ratés. Et si on compare notre cerveau à celui de primates non humains, on observe que les signaux dans notre cerveau sont beaucoup plus informatifs mais aussi plus fragiles, comme si l’évolution a sélectionné chez nous la complexité, l’informativité des signaux, au prix de la robustesse de ces signaux. Comme si, pour permettre la puissance de notre cerveau et la réalité de notre appareil psychique, il avait fallu accepter d’en perdre la sécurité, de connaître des bugs. Et je pense que ces bugs, c’est ce dont nous faisons l’expérience sous la forme de la folie. »